Uvéites infectieuses
Article paru dans les Tyndall n° 32 de mars 2011 et 34 de septembre 2011.
Infections virales
Les virus de l’herpès (HSV), du zona et de la varicelle (VZV) et le Cytomégalovirus (CMV) sont les principaux agents infectieux des uvéites antérieures. Après une primo-infection, ces virus peuvent rester à l’état latent dans l’organisme, dans les cellules épithéliales et les cellules neuronales pour l’herpès et le VZV et dans certaines cellules sanguines, les glandes sécrétoires et le rein pour le CMV.
L’herpès et le virus de la varicelle (zona) donnent rarement des uvéites postérieures mais celles-ci présentent un caractère de grande urgence.
L’uvéite virale est unilatérale, granulomateuse et hypertensive. L’œil est rouge et plus ou moins douloureux. Ces uvéites constituent des urgences ophtalmologiques étant donné le risque de glaucome lié à l’hypertension oculaire.
La majorité de la population est porteuse d’anticorps contre ces virus, 90 % contre le VZV, 60 % contre le HSV1 et 50 % contre le CMV. La confirmation d’une infection oculaire ne peut donc pas s’appuyer sur une analyse sanguine. Elle nécessite un prélèvement d’humeur aqueuse et une identification du virus par analyse moléculaire.
Le traitement à base d’antiviraux ne doit pas être arrêté brutalement et peut être prescrit à long terme en cas de récidives. En association, la corticothérapie locale toujours démarrée après le traitement antiviral permet de calmer l’inflammation.
Infections bactériennes
La maladie de Lyme est une infection due à une bactérie du genre Borrelia transmise par les tiques. la maladie de Lyme doit son nom à une ville du Connecticut (États-Unis) « Lyme » dans laquelle un nombre important d’arthrites inflammatoires a été diagnostiqué en 1975.
Dans les années 80 on identifia l’agent pathogène, un spirochète (bactérie mobile en forme de cheveux) appelé Borrelia. On connaît au moins quatre espèces de Borrelia responsables de la maladie.
Les tiques sont des acariens. Il en existe plusieurs espèces en Europe et aux États Unis mais toutes ne sont pas vectrices de la maladie. Ixodes ricinus est la principale responsable de la maladie de Lyme en Europe.
En France, ces tiques sont présentes dans les forêts et les herbes hautes des champs humides, dans toutes les régions au-dessous de 1000 m à l’exception de la côte méditerranéenne.
Les manifestations oculaires sont rares (1 % des cas), soit 50 à 100 personnes, sachant que la maladie de Lyme touche chaque année 5 000 à 10 000 personnes en France. Les atteintes postérieures sont les plus rares mais elles sont difficiles à diagnostiquer. Le traitement est basé sur l’antibiothérapie.
Pour aller plus loin :
- L’article du Tyndall n°14
- La maladie de Lyme sur le site du Syndicat National des Ophtalmologistes de France.
- La fiche Orphanet de la maladie de Lyme (avec un lien vers un PDF explicatif).
- Un article sur le Diagnostic des uvéites associées à la maladie de Lyme : expérience d’un centre tertiaire (de la difficulté de confirmer la maladie).
- La maladie de Lyme du point de vue de l’ophtalmologue, date un peu (2005) mais intéressant pour la difficulté du diagnostic.
- Le cri d’alarme des médecins.
- Une application collaborative pour signaler les tiques : CiTIQUE.
La maladie des griffes du chat est due à la bactérie Batonella henselae transmise par la salive et les griffes du chat et plus particulièrement du chaton de moins de 1 an. L’infection est visible sur le site de l’inoculation par la présence d’une papule puis d’une croûte qui persiste 1 à 3 semaines. Le ganglion à proximité peut être sensible et une fièvre prolongée ou des troubles digestifs constituent des signes d’alerte.
Au niveau de l’œil, outre une infection des conjonctives, la maladie des griffes du chat peut se manifester dans 2% des cas par une neurorétinite avec œdème papillaire et exsudats en étoile au niveau de la macula.
Les symptômes de l’uvéite postérieure sont une baisse d’acuité visuelle, des flashes lumineux et une sensation d’éblouissement. La guérison se fait en 2 à 4 semaines. Pour éviter les séquelles, on prescrit des antibiotiques et des corticoïdes.
La tuberculose est en augmentation depuis le début du siècle. Dans le monde, 1/3 de la population est infectée et 10 % développent la maladie. En France, 5 000 personnes ont une tuberculose. La tuberculose oculaire peut se manifester sans atteinte pulmonaire.
La tuberculose est à l’origine de 5 à 20 % des uvéites. L’atteinte est polymorphe et le diagnostic, difficile à obtenir, est basé sur différents tests dont l’intradermo-réaction et le dosage de la production d’interféron par les lymphocytes du patient.
Infections parasitaires
La toxoplasmose est l’uvéite postérieure la plus fréquente (jusqu’à 90 % des uvéites postérieures dans certains pays).
Il s’agit d’une maladie parasitaire due à Toxoplasma gondii, protozoaire dont le porteur sain est le chat et dont le cycle de reproduction implique des hôtes intermédiaires dont les animaux sauvages et domestiques et l’homme. Les voies de contamination sont très nombreuses et variées (viande mal cuite, légumes mal lavés, eau contaminée). Il est utile de savoir que la congélation détruit le parasite.
La majorité de la population française a développé des anticorps contre cette maladie généralement bénigne. Par contre, la contamination est extrêmement grave pour le fœtus, d’où les mesures de préventions chez les femmes enceintes séronégatives.
La toxoplasmose congénitale (contamination au cours de la grossesse) est l’objet d’une surveillance très attentive en Europe et on estime qu’elle ne représente plus qu’un tiers des cas de toxoplasmose oculaire. La forme acquise après la naissance parait actuellement la plus fréquente, mais chez l’enfant et l’adolescent, la toxoplasmose oculaire pourrait être la manifestation tardive d’une contamination in utero.
La toxoplasmose oculaire se caractérise par une rétinochoroïdite nécrosante avec la présence simultanée de foyers actifs, formant des taches blanchâtres en fond d’œil et de cicatrices pigmentées.
La maladie évolue par poussées.
Actuellement la toxoplasmose oculaire est traitée presque systématiquement. Une association de pyriméthamine (Malocide ®) et d’arithromycine (Zithromax ®) est prescrite pendant 5 à 6 semaines. L’usage de la sulfadiazine (dont les effets secondaires peuvent être sévères) est limité aux formes résistantes dont les foyers sont proches de la macula. Le Bactrim ® (1 comprimé tous les 3 jours) peut constituer une alternative et un traitement préventif des récidives.
En cas d’œdème maculaire et/ou papillaire, la corticothérapie permet de réduire l’inflammation mais elle ne doit jamais être utilisée seule.
Pour aller plus loin :
- Deux numéros de Tyndall ont été consacrés à la toxoplasmose (n° 8 et 9)
- Le numéro d’Uveitis consacré à la toxoplasmose : Uveitis 2005 n° 2
- La toxoplasmose sur le site du Syndicat National des Ophtalmologistes de France.
La toxocarose oculaire est due à des parasites Toxocara canis et Toxocara cati de la famille des ascaris transmis par le chien. La contamination se fait à partir de la terre, de l’eau ou d’aliment mal lavé. Après ingestion, les larves se développent dans le tube digestif et peuvent disséminer dans tous les tissus dont l’œil. L’inflammation oculaire est due à l’enkystement de la larve. Elle est souvent postérieure et unilatéral et se présente sous forme de granules rétinochoroïdiens en relief. Le traitement est basé sur des anti-parasitaires et des corticoïdes.
Pour aller plus loin :
- La toxocarose sur le site du Syndicat National des Ophtalmologistes de France.
- La fiche sur Orphanet.
Autres agents infectieux rencontrés en Europe
Pour les virus, il s’agit du virus de la rubéole associé au syndrome de Fuchs.
Pour les bactéries il s’agit de Treponema pallidum agent de la syphilis, Tropheryma whipplei pour la maladie de Wipple.
popularité : 10%